Ο Οικουμενικός Πατριάρχης Βαρθολομαίος
ομίλησε σήμερα, Παρασκευή 3 Νοεμβρίου 2017 - ως μόνος εκπρόσωπος του
θρησκευτικού κόσμου - στην 10η World Policy Conference, που συγκαλείται
στο Μαρακές του Μαρόκο (3-5.11.2017).
Τους συνέδρους της Διάσκεψης καλωσόρισε ο Thierry de Montbrial, Πρόεδρος
του Ιδρύματος IFRI (Institut Franҫais de Relations Internationales),
και ο Οικουμενικός Πατριάρχης άνοιξε την Διάσκεψη με την ομιλία Του στα
γαλλικά, την οποία και παραθέτουμε στη συνέχεια, όπως και το σχετικό
βίντεο της έναρξης της Διάσκεψης. Η Πατριαρχική ομιλία στο 35'12'' και
εξής.
Μεταξύ άλλων ο Πατριάρχης είπε:
Μεταξύ άλλων ο Πατριάρχης είπε:
«Δυστυχώς η θρησκεία μετετράπη καθ΄όλη την διάρκεια του εικοστού
αιώνα σε όργανο επιβολής εξουσίας, καταφέρνοντας να εκτρέψει ακόμα και
αυτή τη φύση του θρησκευτικού λειτουργήματος: το να είναι δηλαδή
παράγοντας ειρήνης, συμφιλιώσεως και διαλόγου. Για να καταλάβουμε αυτό
που συμβαίνει σήμερα στον κόσμο, πρέπει να αναλογιστούμε τον ρόλο της
θρησκείας μέσα στην ανθρωπότητα. Αυτό που κάποιοι ονομάζουν “επιστροφή
στην θρησκεία” ή “επιστροφή στον Θεό” μέσα σε μια κοινωνία
“μετά-κοσμική” δεν είναι παρά η ενεργοποίηση μιας ουσιαστικής διάστασης
της ανθρωπότητας που, αν και είναι πολύ στενά συνδεδεμένη με την
ταυτότητα, δεν αποτελεί τόσο σημείο ταύτισης, όσο σημείο διάστασης
μεταφυσικής και πνευματικής. Εξάλλου, η Αγία και Μεγάλη Σύνοδος της
Ορθόδοξης Εκκλησίας, που έγινε τον Ιούνιο του 2016, μας υπενθύμισε τη
σημασία του διαθρησκειακού διαλόγου: Ο ειλικρινής διαθρησκειακός
διάλογος συμβάλλει στην ανάπτυξη αμοιβαίας εμπιστοσύνης, στην προώθηση
της ειρήνης και της καταλλαγής. Η Εκκλησία αγωνίζεται για να καταστήσει
αισθητή την “άνωθεν ειρήνην” επί της γης. Η αληθινή ειρήνη δεν
επιτυγχάνεται με την δύναμιν των όπλων, αλλά μόνον δια μέσου της αγάπης,
ήτις “ου ζητεί τα εαυτής”. Ανάμεσα στους μεγάλους θρησκευτικούς
θεσμούς, το Οικουμενικό Πατριαρχείο Κωνσταντινουπόλεως κατέχει, εκ της
ιστορίας του, μία θέση ιδιαίτερη. Παρά το γεγονός ότι κατά τη διάρκεια
δύο χιλιετιών αντιμετώπισε βαθιές ανατροπές και ρήξεις, οι οποίες
υπήρξαν συχνά τραυματικές, το Πατριαρχείο μας παρέμεινε πάντοτε ενεργό,
απόδειξη του ότι μπορεί να επιζήσει και να αποτελέσει φορέα πολιτισμού
στο πέρασμα των αιώνων. Από την ύπαρξή της και μόνον, η Ορθόδοξη
Εκκλησία συμβάλλει στο να δώσει νόημα και ελπίδα σε ένα κόσμο που
αγωνιά, που αναζητεί σήμερα τον δρόμο του».
Mesdames et Messieurs,
Chers amis,
Permettez-nous d’introduire notre propos
par une citation : « Le monde où nous vivons aujourd’hui a besoin des
valeurs de la religion, qui recèlent les vertus dont nous devons nous
armer pour être dans les bonnes grâces de Notre Créateur, Dieu
Tout-Puissant, et qui renforcent en nous la propension à la tolérance, à
l’amour et à la coopération marquée du sceau de la charité et de la
piété humaines. »
Ces mots, nous les devons à Sa Majesté,
le Roi Mohammed VI, Amir Al-Mouminine, dont le monde connaît
l’ouverture, la sagesse et le désir de bâtir des ponts d’un côté à
l’autre de la Méditerranée, tout en combattant avec courage et
détermination le fondamentalisme religieux. Ce dernier ne se nourrit pas
que d’un désenchantement du monde, que de la faillite de la « modernité
heureuse », que d’une opposition à la mondialisation. Le fait religieux
s’est transformé tout au long du 20e siècle et sa manipulation, pour ne
pas dire son instrumentalisation à des fins hégémoniques, a détourné la
nature même de sa vocation : être un acteur de paix, de réconciliation
et de dialogue.
La scène internationale connaît
aujourd’hui de profonds bouleversements. Les conflits identitaires se
lient à la montée en puissance des injustices sociales. Parallèlement,
la perception des inégalités va croissante. Dans ce contexte
d’insécurité, la religion peut avoir un rôle positif, si tant est
qu’elle devienne capable de se réapproprier la nature de son propre
message. Un message détourné. Un message violé. Un message piégé par le
bellicisme des fondamentalismes. Bien qu’il soit vrai que de nombreux
malentendus sur le fondamentalisme religieux circulent, la religion a
sans aucun doute été utilisée comme un moyen à des fins politiques ou à
des intérêts personnels qui lui sont par essence contradictoires.
Aussi, faut-il bien remarquer la
nécessité impérieuse du dialogue pour répondre aux conflits
contemporains, au-delà de la nature religieuse ou non de ces conflits.
Le dialogue n’est pas une négociation. Ce n’est pas non plus une
controverse. Il s’agit d’une caractéristique de l’être par laquelle se
constitue la qualité relationnelle de la personne humaine. Pour
comprendre ce qui se passe dans notre monde aujourd’hui, il nous faut
réfléchir au rôle de la religion dans l’humanité. Ce que d’aucuns
appellent le « retour du religieux » dans un monde « post-séculier »
n’est en fait que la réactivation d’une dimension essentielle de
l’humanité qui, même si elle est puissamment liée à l’identité, n’en est
pas pour autant identitaire, mais métaphysique et spirituelle.
En ce sens, les fonctions du religieux
peuvent nous paraître évidentes, elles n’en sont pas moins cruciales
pour l’existence et la co-existence humaines : a. La religion est liée
aux préoccupations de l’être humain et nous aide à élaborer des réponses
aux questions existentielles en rapport avec la vie et son sens, la
vérité et l’éternité. b. La religion est liée à l’identité des peuples
et des civilisations. C’est la raison pour laquelle les traditions
religieuses d’autrui doivent non seulement être connues, reconnues, mais
aussi appréciées. Cette connaissance est une condition préalable
indispensable à tout dialogue. c. La religion a participé à la
réalisation des grandes aventures culturelles et civilisationnelles de
l’humanité. d. Enfin, la religion est un facteur essentiel du processus
de paix. Ainsi que l’écrivait saint Paul : « Car Dieu n’est pas un Dieu
de désordre, mais un Dieu de paix. » (1 Co 14, 33)
C’est d’ailleurs ce que le Saint et
Grand Concile de l’Église orthodoxe, en juin 2016, a rappelé s’agissant
de l’importance du dialogue interreligieux : « Le dialogue
interreligieux franc contribue au développement d’une confiance mutuelle
dans la promotion de la paix et de la réconciliation. L’Église lutte
pour rendre plus tangible sur terre la ‘paix d’en-haut’. La véritable
paix n’est pas obtenue par la force des armes, mais uniquement par
l’amour qui ‘ne cherche pas son intérêt’ (I Co 13, 5). Le baume de la
foi doit servir à panser et à guérir les plaies anciennes d’autrui et
non pas à raviver de nouveaux foyers de haine. » (par.17)
Mesdames et Messieurs,Chers amis,
Le Maroc a été un pays précurseur en
matière de dialogue interreligieux, à l’avant-garde de la lutte contre
le fondamentalisme. Comme vous le savez, le bassin méditerranéen a connu
pendant les siècles passés une cohabitation pacifique entre juifs,
chrétiens et musulman. Cette expérience démontre bien, s’il le fallait
encore, que les croyants de traditions religieuses différentes peuvent
vivre ensemble autour d’un projet commun : celui de l’unité de
l’humanité et de la paix.
Parmi les grandes institutions
religieuses, le Patriarcat œcuménique de Constantinople occupe, par son
histoire, une place unique. Au fil des profonds bouleversements souvent
traumatisants qu'il a dû affronter en deux millénaires, notre Patriarcat
a toujours su rester actif, preuve s'il en est qu'il est possible de
survivre et de transmettre un témoignage de civilisation à travers les
âges. Par sa seule existence, l’Église orthodoxe contribue à donner du
sens et de l'espoir à un monde angoissé, qui cherche aujourd'hui son
chemin.
La légitimité des religions aujourd’hui
dépend de leur attitude claire à l’égard de la protection de la liberté
et de la dignité humaines comme des principes fondateurs dans
l’établissement de la paix. Aucun défi, soit-il personnel ou
international, ne trouvera de solution dans la solitude et l’isolement.
Nous avons besoin les uns des autres, car nous sommes des êtres de
relation, des êtres de communion qui, à mesure que nous nous
rapprochons, devenons de véritables acteurs de paix.
Nous ne pouvons que nous réjouir de la tenue, dans ce pays, de cette nouvelle édition du World Policy Conference.
En nous invitant à exprimer ces quelques pensées lors de la séance
d'ouverture, ses organisateurs – et nous souhaitons ici remercier de
tout cœur le professeur Thierry de Montbrial de son amitié – ont
souligné l'importance fondamentale que prend la religion dans la
réflexion sur les affaires du monde, ou, pour parler autrement, sur les
enjeux internationaux. Le Patriarcat œcuménique que nous avons l’honneur
de représenter les en remercie, tout en leur souhaitant un plein succès
dans leur entreprise.